Marik

et   Pierre

Kermaria

   Nomade

 

Paimpol Madère Canaries Sénégal Cabo verde Petites Antilles Cuba Yucatan Açores Paimpol 2003-2004











 


 

 

 



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4. Cabo Verde (septembre-octobre 2003)

Sao Vicente (860 milles, 9 jours)
    On se prépare à quitter Santa Cruz en fin d'après midi. Luc nous demande si on a regardé la météo. Oui, oui, weatheronline for ever, 15 noeuds de nordet, pas de problème. "Ah bon ! Je préfère ne rien vous dire alors". Et nous partons.      
    Dés la sortie du port, un vent frais cueille Nomade, qui gigote beaucoup des fesses sur une forte houle croisée. Marie prend un deuxième ris, nous réduisons le gênois et réglons assez péniblement le régulateur d'allure en choisissant un cap qui nous éloigne de la côte. Nous espérons ainsi trouver un vent plus clément, mais en fait il forcit régulièrement jusqu'à 35 noeuds (force 8) avec des grosses vagues qui bouillonnent au sommet, exactement comme c'est décrit dans les livres. Le troisième ris, c'est Marie qui va au mât, laisse une surface de grand voile qui nous paraît encore bien grande. Et Nomade qui veut à tout prix gagner la côte des grandes Canaries. Et cela va durer une dizaine d'heures. C'est dans des moments comme cela qu'on se demande vraiment pourquoi on s'est embarqué dans une telle affaire. Mais ce sont ces moments là aussi qui vous creusent le caractère, les sensations et aussi l'estomac (surtout si vous êtes sensible au mal de mer !). Et vous laissent, une fois le calme revenu, comme simplifié, et assoupli.
    Le lendemain, mardi, n'est guère plus reposant et c'est seulement le jeudi que l'on retrouve un rythme paisible, avec une mer tout de même agitée, mais un nordet bien stable de 10-15 noeuds.

    Je vois mon premier poisson volant, et un peu plus tard en ramasse un dans le cockpit. Et la nuit suivante c'est quasiment la pêche miraculeuse avec une douzaine d'entre eux qui atterrissent sur le pont tandis que des dauphins longent la coque et sautent à des hauteurs qui, sous la lune, me semblent prodigieuses ; j'ai même peur qu'ils retombent eux aussi sur le bateau ! Et au dîner il y avait déjà deux dorades coryphènes succulentes pêchées à la palangrotte par Marik (et rissolées par moi). Nous allons devenir très intelligents.










  
Les yeux des poissons volants sont étrangement humains.

    Moon. La luna. On peut dire que la lune a "marrainé" notre descente des Canaries au Cap Vert comme Mars a parrainé celle de Muros à Madère. La nuit, l'impression d'être dans une demi-bulle se renforce, et ces loupiotes prennent beaucoup d'importance. Et puis en promeneurs des mers que nous sommes, nous observons et cherchons à emmagasiner tout ce qui vit et brille.
    Redescendons un peu sur terre, sur mer veux-je dire. Au petit matin j'aperçois par un hublot, ahuri, un gros cargo qui passe à 300m de Nomade, alors que l'alarme du radar aurait dû retentir depuis longtemps. Explication : une temporisation de 10 minutes et une zone d'alarme de 3 milles seulement, et un cargo peut faire plus de 3 milles en 10 minutes. Conclusion : repasser la temporisation à 3 minutes. Et réviser ses maths.
    Pétole à nouveau. Fleur marine. Entrées d'eau et sorties d'énergie. A la nuit tombante Marik concocte un nouveau plat : patates râpées, lard, pruneaux, le tout cuit à la vapeur et arrosé d'une sauce crème-oignons. Avec un rosé étrange de la "Valle de la Orotava" (Tenerife) ça réjouit bien le palais. Et en avant pour les quarts nocturnes (qui sont des
moitiés pour nous).

    Fin de parcours en mer douce. Une coryphène glisse des doigts de Marie, et avec elle un bon dîner. Le lendemain apportera une coryphène (la même ??) qui ira, elle, jusqu'à nos assiettes.
Nomade accélère ; il sent le mouillage proche ! Des nuées de poissons volants strient l'horizon. Les oiseaux (labbes et puffins principalement) se font de plus en plus nombreux. Arrivée splendide à Mindelo, tandis que le soleil se lève.

Mindelo
    
Vu du bateau c'est d'abord une petite ville faite de cubes colorés harmonieusement disposés au fond d'une baie grandiose, avec, sur le front de mer, des hommes, femmes, enfants, voitures qui circulent dans un flux continuel et indolent. Le monte Cara, un mont en forme de visage, domine tout cela d'un air impassible. A peine mouillé, nous sommmes abordés par Rafaël qui nous propose de surveiller le bateau et l'annexe. Il est plutôt sympathique avec sa voix cassée et son air rasta : nous ne disons ni oui ni non.
    La ville a un air moderne et actif, tout en gardant, sauf quelques hôtels, une taille humaine. Il y a beaucoup d'incroyables minettes, encore plus qu'aux Canaries.
Cela semble être une institution. Au point que suivant une agent de police en uniforme à qui j'avais demandé ma route, j'ai pu la voir dodeliner des fesses comme si elle marchait sur des talons aiguille de 10 cm de haut. Est-ce à relier au fait que l'on voit couramment dans les mercearia (petits magasins qui font aussi bistrots), même en pleine campagne, des affiches trés suggestives de femmes ou de couples ? Mais au delà de ces apparences, et de l'indolence générale, on est frappé par la gentillesse et la richesse intérieure des gens que l'on approche. Ainsi de la serveuse du "clube nautico" qui semble renfrognée et mélancolique et qui répond à un simple mot sympathique par un sourire d'une luminosité rare (et on comprend mieux sa "mélancolie" quand on sait qu'elle gagne 100 euros par mois dans une ville où la vie est aussi chère qu'en France). Ainsi de José, dont je reparle un peu plus loin, et de beaucoup d'autres. Il y a une âme içi, et la morna n'est pas un vain mot.
    Plusieurs marchés sont disséminés dans la ville. Le marché municipal est le plus étrange, avec ses sculptures de monstres marins et son échoppe d'élixirs, dont l'un fait de vous un Einstein aux muscles ravageurs. Des femmes, créoles pour la plupart (je n'ai vu qu'une noire) vendent fruits, légumes et tabac sur des étalages soignés. On y discute ferme dans une ambiance à la fois populaire et un peu guindée. Il est placé au cœur de la ville, contrairement au marché aux poissons, qui donne sur la mer. Là ce sont les hommes qui découpent, salent, préparent et les femmes qui vendent. A côté, le noyau d'un deuxième marché aux légumes étend comme des filaments dans les rues avoisinantes. Femmes et enfants, assis, debout, proposent herbes, légumes et petits poissons dans une atmosphère animée, souvent cocasse et parfois émouvante.
    C'est dans le tout petit bistrot-resto du marché municipal que je me suis retrouvé, un midi, en quête d'une cachupa, réputée excellente ici. Plus de cachupa ! Pourtant toutes les tables sont prises et les cuillers vont bon train. Je reluque le contenu d'un bol : c'est une sorte de soupe au riz avec des morceaux de viande peu identifiables. J'en commande une et c'est … excellent, même si quelques abats sont un peu mous à mon goût. Une place se libère, et je m'asseois avec mon bol à la table de José, qui engage tout de go, ni distant, ni importun, la conversation, comme si on se connaissait depuis toujours. J'apprends que la cachupa ne se sert que jusqu'à 11h, et que ce que je mange s'appelle une " canja ". Que Cesaria Evora habite à 100 m d'ici, que sa maison est ouverte à qui veut, mais qu'elle s'est envolée pour la France il y a 15 jours. Qu'il n'aime pas trop Herminia, dont on vient d'acheter un cd, mais qu'il préfère à Cesaria une chanteuse qu'il a encore écoutée la veille sur sa radio, mais dont il ne se souvient plus du nom ; et il sort sa radio de sous son coude, en se moquant de sa mémoire, et c'est seulement à ce moment là que je m'aperçois qu'il est en fauteuil roulant. Une jeune femme s'installe à notre table. Ils se connaissent et discutent un moment en riant. Je ne comprends rien. Elle a des traits fins et un air déluré ; et sous l'aisselle une touffe noire frisée qui paraît dure comme une éponge métallique. José m'explique qu'elle est vendeuse ici depuis 15 ans. J'offre un verre et on se quitte comme ça, amis d'un jour.
    Nous voulions, bien sûr, écouter de la musique capverdienne. Nous n'avons réussi que très modestement. Un concert du groupe " Caboça Negra " le premier samedi de notre séjour : la chanteuse, une capverdienne installée en Italie, a une voix aussi énergique que Césaria, et quand elle entonne une morna célèbre, accompagnée de son seul guitariste, la nuit vibre pour de bon. Et quelques airs, chantés par Pedras, le deuxième samedi, attrapés de justesse avant la fin de son tour de chant, alors que nous errions dans les rues à la recherche de sonorités savoureuses. Pour la saveur nous sommes servis ; sa voix comme sa posture sont à la fois touchantes et impayables. Il faut voir ! et entendre ! Parmi les accompagnateurs guitaristes, nous retrouvons Philippe Le Gall, notre plus proche voisin de mouillage, sur Graal. Breton aux ancêtres mi-"coupeurs de verres", mi-"cœurs salés", il a opté pour cœur salé et navigue dans les îles et leur musique depuis 8 mois. Il nous " déniaise " un peu, mais trop tard : si la "musica" reste très vivante à Mindelo, c'est seulement en fin de semaine. Pour ceux que ce sujet intéresse il existe un excellent site : mindelo.info (voir liens, on y apprend en particulier que le guitariste mindelien Bau a été choisi par Almodovar dans Parle avec elle.)
    Nous avons sympathisé avec d'autres voisin-e-s de mouillage. Véronique et Nathalie, qui ont tout lâché pour partir sur leur joli Trismus jaune : Dagobert. Avec leur moral d'acier et leur profonde gentillesse on peut difficilement ne pas les apprécier. Un peu plus loin, trois jeunes Français sur un bateau étroit un peu bizarre, et qui nous paraissent un peu aventureux, se révèlent mener un formidable projet social(voir le lien : passeraile). Plus loin encore, Daniel et Catherine, partis de puis 9 ans sur le rêve d'antilles "Trait-d'union ", sont des puits d'expérience, ainsi que Marie et Jacques, partis " seulement " depuis 4 ans, avec leur fille Océane. Marik se demande souvent commment ils font tous pour joindre les deux bouts (ah, ah !), mais ce sont des secrets de marins, n'est-ce-pas !
    Sur le plan pratique, pas grand-chose à ajouter à l'Imray. Il ne semble plus y avoir d'insécurité : nous avons laissé Nomade 3 jours sous la seule garde des voisines, avec l'annexe à l'arrière, sans problème. Faire garder l'annexe ne semble pas utile non plus. Bien sûr il ne faut pas laisser traîner son portefeuille : comme partout ! On peut faire le plein d'eau (déssalinisée) et de gazole sur un quai assez éloigné, au sud-ouest. Il ne faut pas hésiter à filer de la chaîne (40 m en ce nous concerne) car le vent s'est souvent levé avec de violentes rafales de nordet. Le seul cyber-café où j'ai pu actualiser ce site se situe dans la rue en haut et à gauche de la Lisboa. Et le restaurant Pico Pau est bien sympa, avec ses centaines de lettres de remerciement qui volètent au mur.

Santo Antão
    Tous ceux qui reviennent de Santo Antão sont si emballés que nous décidons de prendre à notre tour le ferry. On part comme des voleurs, à l'aube et à la rame ; l'annexe sera ramenée au bateau par les voisines. La traversée sur le Ribeira do Paul (une institution ici) se fait sans encombres, par petite houle, mais quelques passagers sont tout de même bien verts et se penchent bizarrement par dessus bord. On trouve tout de suite un aluguer, et nous voilà à Corva, un cratère entièrement cultivé, où des pins siffleurs, des nuages fantomatiques, des silhouettes courbées sur la terre et une verdure tropicale évoquent "les contes de la lune vague après la pluie". Et pour la pluie, la chuva, on est servi ; sitôt arrivés dans la descente vers Ribeira grande, c'est une mer de bruine et de blancheur opaque qui nous attend. Après une petite hésitation, durant laquelle on savoure de toute notre peau la fraîcheur de l'air, on emprunte le chemin empierré (et parapeté !) qui serpente le long d'une paroi verticale qui nous paraît d'autant plus vertigineuse qu'on n'y voit pas à 10 m ; seuls des sommets pointus se profilent parfois dans une échancrure des nuages (comme au Machu Picu paraît-il). Les cailloux sont glissants, on croirait presque skier sur une pente neigeuse. En bas, changement de décor. La lumière revenue inonde un gigantesque eden : manguiers, bananiers, jacquiers prolifèrent à perte de vue, avec par ci par là des retenues d'eau et des chaumières. Eden pauvre, malheureusement : les premières habitations n'ont ni électricité, ni route d'accés. Et si enfants et femmes paraissent délurées, un homme, à qui je lance un "boa tarde" sympathique, ne me rend qu'un regard triste et lourd. Plus loin une odeur suave nous attire : c'est celle d'une "groguerie". Elle est installée sur une petite hauteur, où nous nous hissons. Un jeune, qui parle français svp, nous montre l'alambic et son système de refroidissement en rigole, la cabane où sont stockés les fûts de jus fermenté et de grogue, et l'aire où les cannes sont broyées et le jus mis à fermenter une quinzaine de jours dans un grand bac. On trinque et c'est fort bon. Il nous parle de son île où les gens sont honnêtes, contrairement à Mindelo, le chicago du cap vert. Et il nous fait le geste d'un doigt qu'on coupe pour en récupérer la bague. Il trinque et retrinque. On achète un litre, qu'on met dans une bouteille d'eau en plastique !
    La descente continue, encore plus euphorique, jusqu'à ce que des pluies diluviennes à répétition éteignent nos ardeurs. Mes grosses chaussures pleines d'eau, on finit par s'abriter dans une maison en construction, où le propriétaire, un capverdien de retour chez lui aprés une longue émigration, nous prend en charge. Il arrête un bus municipal, qui nous mène à fond la caisse sur une route de plus en plus boueuse, à Vila das Pombas. Puis dans la foulée un aluguer nous mène directement à notre destination : la pension de Mme Fatima à Ponta do sol. Il était temps car une heure plus tard la route n'était plus praticable.
    Il reste une chambre qui donne sur une grande terrasse, et avec douche : le grand luxe, pour 1800 escudos. Ayant essoré nos vêtements et vidé tant bien que mal l'eau des chaussures, nous sortons : c'est le dernier jour d'une fête religieuse qui en compte 3, et il y aura bal ce soir. La nuit est tombée, mais les rues restent très animées avec des stands un peu partout, et des odeurs de grillades ; bonnes, les cuisses de poulet ! A plusieurs reprises nous repérons des ombres porteuses de violon, guitare et autre cavaquinho, mais chaque fois elles disparaissent sans savoir ni où, ni comment. Par contre un mouvement incessant de jeunes nous mènent facilement à la salle de bal. Il est 10h et soudain une présentatrice fait une annonce, et tout se vide. Nous attendons un peu, puis rentrons à la chambre, dépités. Et à 11h, une musique intéressante monte dans la nuit ; mais nous n'avons plus le courage de redescendre, d'autant que demain c'est tôt réveil et tôt départ pour une balade réputée splendide.
    Nous décidons d'aller à Corvo, aller et retour à pieds, plutôt que de gagner Cruzinhas en aluguer et d'en revenir par le chemin côtier. Très vite on domine la ville, qui fait assez jeu de construction, avec ses rues bien quadrillées, son petit aéroport qui donne directement sur la mer, et son minuscule " hydroport ", plus petit encore que celui de Sercq et qui abrite quelques longues barques tirées au sec. Puis nous longeons des falaises rouges tombant en à-pics vertigineux sur la mer parfaitement bleue. Dans la lumière lavée par les lumières torrentielles de la veille, c'est un monde tout neuf, d'une beauté gigantesque qui nous apparaît. Et ce n'est pas fini ; car nous arrivons dans une vallée verdoyante, avec un village, des maisons dispersés, des chèvres noires, des sources mieux disposées que dans le rêve le plus fou d'île au trésor d'un enfant rêveur. Et à l'entrée de Fontainhas, un papayer avec une papaye, toute seule et bien mûre sur le tronc, comme le fruit défendu de l'Eden.

    Nous nous arrêtons chez une dame, dans une courette ombragée, pour boire. Puis nous repartons pour Corvo qui se trouve dans la vallée suivante. Ca monte, la lumière est plus lourde, et notre marche aussi. En haut, un roc se dresse comme un grand mur de maison en ruines. La descente est facile, d'autant que de l'eau suinte des parois rocheuses et coule dans le fond du val. Un homme nous dépasse à toute allure ; il est pieds nus, sur des pierres qui ne sont vraiment pas des galets, et nous laisse interloqués.
Des chèvres noires ...
    Le village, Corvo, est aussi vert, mais plus labyrinthique encore que Fontainhas. Nous descendons jusqu'à la mer, et nous y trouvons de la fraîcheur, bien que rouleaux et rochers empêchent toute baignade.
     La remontée est franchement dure, et Marie-Christine qui n'a pas de chapeau et à qui je propose ma casquette un peu tard, atteint une couleur presqu'aussi rouge que celle des libellules que l'on peut voir par ici. En haut, nous retrouvons le coureur, assis en lotus, en pleine méditation, et nous nous posons près de lui sans qu'il bouge un cil. On dirait Milarepa ; et c'est vrai que seuls les pieds d'un moine magicien du Tibet peuvent voler comme ça au dessus des cailloux. Nous croisons des femmes portant de lourdes charges sur la tête, autre forme de sport ! (on ne peut aller à Corvo qu'à la marche).
et des libellules rouges.
    A Fontainhas nous retournons chez notre dame ; nous sommes de vieilles connaissances, n'est-ce-pas ? et nous commençons à parler. Miracle, bien qu'elle ne parle qu'en portugais, nous arrivons à la comprendre et à tenir une conversation : elle a 8 enfants, dont un à Lisbonne et une autre à Marseille. Et elle rentre de Marseille justement, où elle est restée 45 jours. Elle nous détaille son voyage, et elle en est encore éblouie : aussi belle que soit sa vallée, cela ne suffit pas.
 Au retour sur Ponta do Sol, les falaises sont toujours aussi impressionnantes, mais la lumière trop crue a rompu l'enchantement. Nous sommes contents de retrouver notre chambre, puis de faire un copieux dîner, avec de délicieux légumes mijotés par Mme Fatima
;

Sao Nicolau et Boa Vista
    Après Santo Antao, nous restons encore quelques jours à Mindelo et partons pour Boa Vista (120 milles). Comme souvent, nous traînons un peu et le départ se fait un peu tard dans la journée. Après une nuit en mer, nous savons qu'on ne pourra arriver à Boa Vista avant la nuit, ce qui ne nous plaît pas trop, l'île est réputée pour être un cimetière de bateau ; peut-être est ce dû aux erreurs magnétiques connues dans ce secteur. Un navire espagnol d'exploration des zones de pêche a coulé devant le port de Sal Rei quelques semaines auparavant et nous ne tenons pas à être le suivant. Nous sommes à ce moment devant Sao Nicolau et, vu le beau temps, décidons de mouiller pour la journée devant le petit port de pêche de Carachal à la pointe Sud-est de l'île. Cachée derrière les collines arides, la baie est minuscule, entourée de rochers, avec une petite plage bordée de palmiers. A peine arrivés, deux nageurs viennent nous saluer. Manuel, qui est pêcheur et Luis, qui habite Mindelo et est en vacances dans le village. Heureusement, Luis parle couramment espagnol pour avoir fait ses études à Cuba et la conversation peut se faire autrement que par gestes, d'autant plus que chaque île a son créole et que le portuguais n'est pas la langue parlée.

    Carachal estcomplètement isolée, seule une piste la relie aux autres parties de l'île, pas de voitures personnelles, pas de boutiques sinon quelques mercearias mais ... un dancing, à la façade vert pétant et qui distille de la musique disco à fond les décibels dés le crépuscule. Nous qui pensions qu'enfin, dans ce lieu authentique, nous allions entendre au coin d'une rue quelques airs de mornas ou de coladeiras !
   

     Pendant notre balade dans le village, un bruit nous intrigue et nous mène vers un terrain de sport bétonné, face à la mer. Des enfants sont en train de mener une partie endiablée de hockey, avec comme patins des bouteilles plastiques de coca écrasées. Dans les rues, c'est visiblement l'heure de la détente, les hommes sont au bistro ou discutent entre eux sur les pas de porte et les femmes sont installées dehors à jouer aux cartes ou à faire des tresses dans les cheveux des fillettes. J'ai l'impression de débarquer sur une autre planète. C'est tellement différent de Mindelo. Les maisons sont plus que simples, pas de meubles, la cuisine se fait dehors sur des braseros, et à la nuit tombée, tout devient noir et nous n'avons plus qu'à rentrer au bateau. Carachal nous plaît et nous décidons de rester quelques jours ici.
   

     Le lendemain, lever à l'aube pour aller découvrir la vallée. Un ruisseau bordé de petits jardins coule faiblement et nous ne rencontrerons pas âme qui vive. Le contraste est saisissant avec Santo Antao où chaque parcelle regorgeait de plantations. Le fond de la vallée est plein de palmiers dattiers, malheureusement les dattes ne sont pas mûres, elles sont grosses mais encore jaunes et ont le goût rapeux des prunelles. Je vois mon premeir baobab à côté d'un magnifique dragonnier.

    A notre retour, les pêcheurs sont en train de pêcher à la senne (on dit comme ça je crois ?) dans la baie. Ca crie et s'agite, les enfants tapent dans l'eau pour empêcher les poissons de quitter le filet. La pêche est bonne et atterrit dans une nasse flottante. Ce sont des leurres qui serviront à toute la communauté des pêcheurs pour la pêche au gros. Manuel nous en donne un plein sac qui terminera en une délicieuse friture.

    Après Mindelo et sa baie aux eaux troubles, cela fait du bien de pouvoir se baigner. La température extérieure avoisine les 30° et l'eau, pourtant chaude, est un vrai bain de fraîcheur. En plus, les fonds sont superbes, poissons perroquets, girelles, poissons trompette et bataillons de poissons multicolores dont je ne connais pas le nom. Il ne manque que les langoustes dont on ne voit toujours pas la couleur alors qu'elles abondent au cap vert d'après ce qu'on a pu entendre dire. Il parait aussi qu'il y a pleins de requins, des gentils et des plus méchants. Le lendemain, un pêcheur débarque le produit de sa pêche sur les rochers, thons, coryphènes, brochets de mer sous l'oeil attentif des femmes. Je veux acheter un garupa, sorte de petit mérou tout rouge à pois bleus, la femme ne veut pas que je paye et, juste avant notre départ, Manuel revient de la pêche et nous en offre un autre. Court bouillon pour l'un, à l'étouffée pour l'autre, c'est ma foi délicieux et vu nos exploits en pêche sous-marine ou en pêche à la ligne, il sont les bienvenus.

    Départ au crépuscule. Pierre lève l'ancre et j'entend tout d'un coup un boucan de tous les diables ; c'est la chaîne qui a sauté du guindeau et tout redescend à l'eau. J'en suis quitte pour une grosse frayeur en voyant Pierre essayer de freiner la chaîne avec son pied.

    Nous quittons avec nostalgie ce village qui se meurt tout doucement depuis que la conserverie a fermé ses portes.

    Nous arrivons, comme d'habitude au petit jour, à Sal Rei "Sel Roi" sur l'île de Boa Vista. La baie est immense, entourée d'une plage de sable blanc immaculé. Deux bateaux sont au mouillage mais ils partent dans la journée, du coup, on se sent un peu isolés, tous seuls dans cette grande étendue et à 15 min en annexe du port. L'atmosphère est curieuse. D'un côté, des hotels tenus essentiellement par des italiens et de l'autre, le village où les femmes frottent le linge sur la planche à laver. Comme c'est le WE, pas d'aluguer pour sortir de Sal Rei. On essaie une ballade à pied jusqu'à la praia de atalanta sur la côte nord pour voir le Cabo Santa Maria, un vapeur qui a coulé sur la plage en 1968. Manque de bol, après une marche en plein soleil au milieu d'anciennes salines, nous atterissons trop à l'ouest. Tant pis pour le vapeur ... Finalement, nous ne verrons pas grand chose, et les seuls moments vraiment sympas seront une soirée passée avec des capverdiens avec chants et guitare en alternance avec un match de foot à la télé, et une incursion, le dimanche matin, dans une église où les paroissiens chantent des cantiques sur des rythmes....endiablés !

    Ceux ou ce qu'on aurait pu voir : le padre français de l'île qui tient une papeterie à Sal Rei, l'éclosion de tortues sur la praia de Santa Monica, la frégate rarissime, visible seulement sur l'îlot de Curral Velho, le festival de mornas qui avait lieu le WE précédent.